vendredi 13 novembre 2009

Mohand Arab Sadaoui


Mohand Arab Ait Ali Oussaid




MOHAND ARAB AIT ALI OUSSAID





« SADAOUI MOHAMED » pour l'état civil



Son enfance

Mohand Arab est né le 19 Mai 1923 à Ait Saïd, Fils d'Arab et de KACHER Melha.

Il n'a pas de frère, par contre il avait 8 sœurs, respectueuses de leur frère qui leur vouait une grande affection

A 6 ans, il est inscrit à l'école de Tslatha près d'Ait Ikhlef. L'instituteur M. SALHI ; ami à son père, est au petit soin avec le jeune Mohand. Il est dispensé des corvées que faisaient pratiquer à l'époque le maître pour ses élèves. Soins et entretiens des potagers et du verger de l'instituteur.

Mohand est séduit par la grammaire, l'arithmétique et les récitations. Le maître communique avec ses élèves aussi bien en français que dans leur langue maternelle. Naturellement les jeunes, très peu ou pas du tout francophone, mais berbérophone de naissance, trouvaient plus aisé de s'exprimer en kabyle. Cela dès lors ne facilite pas pour eux l'acquisition de la langue de Molière. C'est peut être l'une des causes des résultats scolaires plutôt médiocre des enfants



Après 5 ans d'études, Mohand détient les bases qui lui permettront d'affronter la vie et de pratiquer la langue usuelle du français. Plus tard, les échanges lors de ses séjours en France et à Sétif, lui offriront d'autres connaissances en syntaxe et enrichiront son vocabulaire.

La mort de sa mère, alors qu'il n'avait que 11 ans l'avait profondément affligé. Dans son chagrin, il se dépassionnera pour ses études.

Très jeune, il travaille alors les arpents de terre qui appartiennent à sa famille. Labours, fenaisons, moissons et cueillettes des olives. Il tiendra aussi la paire de bœufs pour le labourage des champs.

Les ressources de la grande famille (oncles et cousins) étaient limitées, mais suffisantes pour une vie simple, sans faste. Une partie des ressources provenait du produit de leur terre.

La famille est sortie de la précarité, lorsque le père Arab, diplômé en construction métallique en 1902 exerça en France et à Sétif, en qualité de contremaître dans de grands ouvrages d'envergures.

Sa mère Melha Ait Mohand, à l'instar des paysannes de l'époque est polyvalente ménagère, jardinière et aussi tisseuse.

A l'époque la vie quotidienne au village na pas encore été marquée par les commodités de la « way of life » occidentale. Les vêtements sont traditionnels « tajelabt «, est tissée par sa mère, et en fait légitiment l'objet de sa fierté.

L'enfant est bien élevé, sage et soigneux. Il a sans doute hérite des dons de son père. La crainte teintée de respect pour son père, lui impose une conduite qui l'éloigne des mauvaises fréquentations.

A la manière des ascètes, le jeune Mohand aime se retirer en des lieux solitaires. Il est souvent dans les champs piochant et entretenant figuiers et oliviers. Il greffe à sa guise des boutures d'oliviers, dont on voit aujourd'hui de beaux spécimens à Azaghar et Nezla Ouamrane

Jeunesse et prise de conscience





Il voue un respect immense aux grandes personnes, auxquels il empreinte leur sagesse. Il percevait les mots des anciens comme des clés qui permettent de comprendre et d'harmoniser le monde. Des gardes fous qui protègent du précipice.

Les valeurs morales, ainsi codifiées, détermineront en partie la personnalité et la conduite de Mohand Arab. Il parle peu, écoute beaucoup, et à l'occasion s'exprime toujours avec son petit sourire

Très jeune, il marqua un amour profond à son grand père Ameziane. Ainsi écolier, le bout de pain qu'on lui remettait le matin en partant à l'école ; il le gardait pour le redonner, à son retour, à son grand père. Son grand père vieillard, aveugle, vers la fin de sa vie, a était très touché du geste de son petit fils.

Son grand père un jour à l'adresse de Mohand Arab lui fit ;

« Mon fils ton pain à toi sera blanc, il ne sera jamais noir, et tu vivras dans le bien être, aisance et opulence »

Son père est un professionnel de renom dans la mécanique et la menuiserie. Mohand Arab voulu suivre son père pour apprendre son métier, mais celui-ci l'en dissuada. Il ne voulait pas d'un emploi pénible et dur pour son fils. Il voulu le destiner à poste de bureau dans l'administration.

Emigration

L'adolescent Mohand Arab quitte le village pour aller s'employer en France. Il débarque ainsi à Marseille à l'age de 18 ans. Le voyage pour les migrants de l'époque est déjà un calvaire. Il faut passer par des formalités et des tracasseries administratives dissuasives. Obtenir une carte d'identité après le passage oblige du Caid et du fonctionnaire de la commune mixte.

Traverser la méditerranée à bord d'un navire à charbons, inconfortable et sur une chaise longue durant 30 heures.

Sous l'œil vigilant et protecteur de son oncle Hadj Hend, il est engagé dans un chantier naval, comme peintre sur bâtiments, à Port Vendres (près de Marseille). Le voila, sa première migration, il rompt le lien ombilical qui l'a toujours rivé à Ait Saïd. C'est la pour lui une césure dans sa vie.

Mohand Arab comme le veut la tradition, remet sa paye à son oncle. Quelques mois plus tard son oncle, devant rentrer au pays, l'appelle pour le remplacer dans le restaurant, qu'il exploitait rue des chapeliers. Il regagne Marseille, ou il retrouve les ouvriers algériens ; et avec ses clients, il retrouve les mots du village.

Le restaurant est un microcosme, ou les émigrés du village refondent l'assemblée du village et où ils ne se sentent plus, dès lors, tout à fait à l'étranger. Mohand Arab, jusque la ouvrier, poussé par la responsabilité de son oncle, et aux contacts avec les autres commerçants se découvre un homme d'affaires hors pairs.

En l'absence de son oncle, il s'engage dans l'achat (avec facilite de paiement) d'un hôtel de 50 chambres, avec restaurant dans un grand boulevard de Marseille. Il y fit l'inventaire avec l'ancien propriétaire et commença à travailler. Il n'attendit que le retour de son oncle pour effectuer les formalités d'actes.

Hadj Hend, arrivant du bled, trouva Mohand Arab outrepassant ses prérogatives. Il le sermonna par de violentes réprimandés et lui enjoint de quitter immédiatement l'hôtel. La tentative qu'il croyait prospère pour la famille n'a pas été un succès.

Accablé, ses regards se portent désormais vers l'autre rive de la méditerranée

Service militaire

Rentré au pays, il est appelé au service militaire. Il est affecte à El Asnam (Chlef), un mois plus tard il est mute à Djelfa.

Son père lui rendant visite immédiatement après, par un mois d'hiver découvre Djelfa. Il jura qu'il n'avait pas ressenti un froid aussi vigoureux en France que dans cette ville.

Son père se démena, auprès de ses connaissances, pour le faire muter de cette ville. Mohand rejoint ainsi, un mois après, Alger et est affecté au cercle des officiers (de La Jenina) Square Port Said. Sa gentillesse et se tenue le propulse maître d'hôtel.

Il est à signaler que dans ce foyer exerçaient aussi son oncle Mohand Ameziane et Saidi Omar. Au bout de 4 mois ; il est démobilisé, rendu à la vie civile, tout en gardant son poste dans ce foyer.

Sa maîtrise dans le travail, l'emmènera à s'occuper de l'aile réservée au maréchal Juin.

A Alger, il entreprit une association avec Mohand Oulhadj Ait El Hadj. L'acquisition d'une crémerie, puis un café restaurant, en face de la préfecture (wilaya) d'Alger « le coq Hardy ». Cette période coïncidant avec les pires moments de la seconde guerre mondiale et le débarquement américain ; Les affaires n'ont pas prospérées.

Son foyer





Marie à Azouaou Taous, de son foyer, Mohand Arab aura huit enfants. Il était un père modèle, il n'a jamais grondé ses enfants, il était toujours aux petits soins avec chacun. Ses enfants d'ailleurs, le lui rendront bien durant toute sa vie. Très pointilleux, sa passion était de prendre ses repas avec tous ses enfants. Il ne tolérait aucune absence ou retard. D'ailleurs, il quittait son travail à l'heure du repas, quelque en soit la situation.



Sétif, le 5 juillet 1962

Installation à Sétif

La fin de la seconde guerre mondiale proclamée, son père lui conseille de rejoindre Sétif.

En effet son beau père Idir Ath Ougawa, élu Amghar El Aârch est souvent appelé au village et au douar pour régler les problèmes de la collectivité. Pour ses absences, il est à la recherche d'un élément de confiance et de sérieux pour le remplacer.

Mohand rejoint donc Sétif, abandonnant ses affaires à d'Alger. Il se forme au contact avec son beau père aux règles de la comptabilité et de la gestion des comptes des moulins Audireau. Il reçoit régulièrement du courrier du bled de son père l'exhortant à bien se comporter et de respecter son beau père. Au bout de quelques mois, son beau père le sachant complètement intégré lui confie tout le travail ; et ne supervisait que de loin les opérations.

Le sentiment nationaliste est très épanoui chez lui. Endoctriné par son oncle Mohand Ameziane à Alger ; il a sa carte du PPA, et avait appris par cœur les chants nationalistes. En 1945, à Sétif, lors du défilé du 8 mai, Mohand Arab s'affiche, dans la rue, coiffe de son « Fès », symbole du combat nationaliste.

Cette coiffure, il la portera plus tard durant la révolution et après l'indépendance

La guerre de libération

La guerre de libération nationale algérienne éclate le 1 novembre 1954, Mohand est un politique résolu. Militant assidu. Un élément sur lequel l'organisation FLN fonde respect et de grands espoirs.

Mohand est très apprécie des gens du peuple. Attaché aux siens, il était doux et affable. Il participa à des réseaux de transfert d'armes et de ravitaillement aux combattants. De par le poste qu'il occupait (commercial) il organisa des transferts d'armes et munitions par camouflage à l'intérieur des chargements de semoule et pâtes en directions de différentes régions.

Par ailleurs ; il était la boite postale de tout le courrier en provenance ou en direction de la wilaya 3. Il était chargé de mission de la Kabylie vers la willaya 1 et 2, limitrophes de Sétif.

En outre, sous couvert de visites familiales, il se rendait régulièrement au bled. Les grandes opérations militaires et les périodes difficiles 1959, 1960, 1961 1962, ne l'ont pas empêché de continuer ses actions.

La mort de son père ; il avait 28 ans

A Sétif, par une froide journée de janvier 1953, Mohand Arab avait le cafard toute la journée. Le soir il est seul à la maison, son beau père absent est au bled. Malgré le froid, il sort faire un tour en ville. En flânant, il passe devant la place centrale de la ville, ou est dressé le chapiteau du cirque Amar. Il tente de dégager son stress de la journée, en s'entraînant découvrir les arènes du cirque. Il prend un billet et pénètre sous le chapiteau.

A peine installé, que grésillent les hauts parleurs, annonçant qu'il est demande à l'entrée du cirque. En sortant, il voit AMARA Rabah le visage blême, Mohand compris que c'était grave. D'un réflexe il lui fit ; il est arrive quelque chose à mon père ?

Rabah, essayant de chercher ses mots ; mais Mohand continua : Dis moi, dis moi c'est mon père ?

Rabah ; j'ai reçu un coup de fil (téléphone) d'Azazga, ton père serait... Mohand a compris sa douleur.

Il décide de partir sur le champ, c'était onze heures du soir. Sans aviser sa sœur Djedjiga et son beau frère Mokrane Ait Ougawa, qui résidaient aussi à Sétif, il prend un taxi et direction le pays. La neige commençait de tomber.

Arrive a Adekar, 3 heures du matin, la route est bloquée par la neige. Il y avait par endroit jusqu'à un mètre de neige. Impossible de continuer en voiture, Mohand libère le chauffeur et prend le risque de partir seul à pieds.

Par moment, il veut couper, le trajet vers Ait Saïd, par la montagne à travers l'Akfadou. Il connaissait le chemin, car son père qu'il avait accompagné ; alors qu'il n'avait que 12 ans, avait fait acheminer le moulin, Tahouna d'Ybouyisfène, à travers cette montagne et depuis ce village d'Adekar.

Mais il se ravisa ; le chemin est enneige et il risque de se perdre en pleine nuit. Il suit donc le tracé du chemin routier vers Azazga.

Après avoir fait, seul en pleine neige, plus de 40 km à pieds, il arrive à Assif El Hemam, il entre dans une boutique, café ; les vêtements compléments trempés. Mokrane Mohand Oulhadj, une connaissance à son père le reconnu. Le voyant dans cet état, il le prend par l'épaule, et veut l'emmener chez lui changer de vêtements, Mohand Arab, en sanglots, lui annonça la mort de son père.

Mohand Oulhadj est stupéfait ; il n'arrive pas a réaliser, lui qui avait vu son père quelques jours seulement avant à Azazga. La famille Mokrane est très puissante à Assif El Hemam, ce sont de riches commerçants. Mokrane avait composé une forte délégation, pour accompagner Mohand Arab vers Ait Saïd. Ils s'engouffrent dans 2 voitures et un camion, qui frayait le passage, car la neige ne cessait de tomber et la circulation très difficile

Son parcours professionnel



Il a été chef de service des ventes des établissements Audireau jusqu'à l'indépendance. Après le départ des français, l'état ayant nationalisé les usines ; Mohand Arab se retrouve chef du centre de distribution de la société nationale Sempac, pour la wilaya de Sétif

Il a servi avec dévouement, abnégation et sincérité. Contribuant à la formation de plusieurs cadres de l'entreprise. Son esprit brillant, sa parole respectée.

Il a été d'une parfaite civilité en toute circonstance, par son ouverture d'esprit. Grâce à son expérience éclairante, il a été capable d'aborder les sujets les plus divers, il avait un sens aigu de l'humour, qui lui permettait de s'exprimer par quelque trait discrètement incisif.

Personne très pieuse, tolérante, généreuse, courtoise, alliant modestie et discrétion en toute circonstance



Tous ceux qui l'ont connu, approché et travaillé avec lui

Se souviennent encore avec respect de lui ; et ils ne cessent d'évoquer

à chaque occasion ce pilier et cet icône que fut

« Si Mohamed » MOHAND ARAB ATH ALI OUSSAID







Son petit fils Idir

































Lettres que lui adressait son père

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